« J’ai tout perdu quand je suis devenu un homme. »

En 2015, de nombreuses personnes transgenres très médiatisées ont retenu l’attention. Caitlyn Jenner, autrefois athlète olympique, a fait la une du magazine Vanity Fair. Des émissions de télévision comme Orange Is the New Black et Transparent ont été acclamées par le public et les professionnels du milieu. Le Manitoba a nommé son premier juge transgenre. En Colombie-Britannique, l’Université de Victoria a créé la première chaire d’études sur les transgenres. En Ontario, le gouvernement a grandement assoupli le mécanisme d’avis médicaux utilisé pour autoriser une chirurgie de changement de sexe et a adopté des politiques améliorées à l’égard des détenus transgenres.

Ces changements représentent des étapes importantes vers l’acceptation des personnes transgenres par la société.

Par personne transgenre on entend une personne intersexuée, une personne en transition (qu’elle soit médicale ou sociale), une personne aux-deux-esprits ou bispirituelle, une personne de genre non binaire ou une personne non conformiste de genre.

Les personnes transgenres vivent encore des difficultés dans leur vie de tous les jours. Peu importe leur métier ou profession, que ce soit dans le domaine du commerce de détail, de la finance ou des arts, de nombreuses personnes transgenres subissent encore de la discrimination. Les mécanismes de protection juridiques qui attendent d’être mis à jour, les politiques archaïques et l’intolérance créent des embûches dont ces personnes pourraient se passer. Les employeurs, de même que les collègues de travail, ont souvent de la difficulté à accepter une transition de ce genre.

« Je me sentais comme un homme dans la peau d’une femme, alors je n’avais pas le choix de changer de sexe. »

Le musicien torontois Lucas Silveira en est un bon exemple. L’auteur-compositeur-interprète pensait que le fait de travailler dans un milieu artistique faciliterait sa transition. Malheureusement, les membres de son groupe de musique, toutes des femmes lesbiennes, se sont senties mal à l’aise quand il a pris cette décision. « J’ai vécu à ce moment le plus grand chagrin de ma vie. Bien des lesbiennes de mon entourage avaient une idée préconçue de la masculinité comme étant nécessairement marquée par l’agressivité », se rappelle Lucas Silveira, qui a entrepris sa transition de genre il y a une dizaine d’années, à l’âge de 32 ans. « J’ai tout perdu quand je suis devenu un
homme. »

Le groupe qu’il avait fondé s’est dissous, ce qui a obligé Lucas Silveira à se débrouiller tout seul, lui qui vivait difficilement les effets inconnus des hormones et craignait que le traitement n’abîme sa voix. (Heureusement, les faibles doses qu’il prenait n’ont pas eu cet effet secondaire.)

« Je me sentais comme un homme dans la peau d’une femme, alors je n’avais pas le choix de changer de sexe. Quand je me réveillais le matin, je ne me reconnaissais pas dans la personne que je voyais dans le miroir. Cette situation m’a causé beaucoup de problèmes avec mon groupe, avec mon gérant et par rapport à mon identité d’artiste. »

Heureusement, Lucas Silveira, qui réussit à gagner sa vie comme musicien, a renouvelé son public grâce à la communauté transgenre. Mais il n’est pas le seul à se battre pour se faire accepter tel qu’il est. « Un changement de genre peut faire peur aux autres. Les gens pensent que tu as une maladie mentale. On est tellement stigmatisé », affirme le musicien. « Les changements sont si visibles que c’est impossible de faire ça sans que les gens s’en aperçoivent. »

D’après une enquête réalisée en 2011 auprès de personnes transgenres en Ontario, 18 p. 100 des répondants n’avaient pas obtenu un emploi à cause de leur identité transgenre, 73 p. 100 avaient été ridiculisés et 26 p. 100 avaient été agressés.

Enquête de 2011

Discrimination vécue par des personnes transgenres en Ontario

73%

Ridiculisées

26%

Agressées

18%

Non retenues pour un emploi

33%

Occupent un emploi à temps plein

« Les personnes trans remettent en question la conception normative du sexe et du genre. Pour favoriser l’inclusion et la sécurité, il faut amorcer un changement de culture en ce qui concerne notre conception du genre. »

Des 433 personnes transgenres questionnées, seulement le tiers d’entre elles travaillaient à temps plein malgré le fait que 71 p. 100 ont fait des études collégiales ou universitaires. Financée en partie par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), l’enquête a aussi révélé que de nombreuses personnes ne possédaient pas de pièces d’identité indiquant le genre qu’elles affichaient dans leur quotidien. Cette lacune a des répercussions dans tous les aspects de leur vie, à commencer par la possibilité de conduire un véhicule jusqu’aux difficultés à faire des voyages, à encaisser un chèque ou à obtenir des services. Elle cause aussi des problèmes quand on est en recherche d’emploi, surtout quand une personne transgenre essaie de limiter les renseignements personnels à transmettre à des employeurs potentiels.

Par ailleurs, de nombreuses personnes transgenres se font poser sans détour des questions indiscrètes sur la nature de la chirurgie de changement de sexe.

« Le corps d’une personne transgenre devient un sujet d’intérêt public. Les gens sont curieux. Beaucoup posent des questions obscènes. Ça peut être vraiment pénible », fait remarquer un porte-parole d’Egale Canada Human Rights Trust, un organisme national de défense des droits qui milite en faveur de l’égalité des personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles ou transgenres. « Les personnes trans remettent en question la conception normative du sexe et du genre. Pour favoriser l’inclusion et la sécurité, il faut amorcer un changement de culture en ce qui concerne notre conception du genre. »

Les organismes de soutien et de défense des droits des personnes trans sont de plus en plus actifs dans les villes et les régions des quatre coins du pays. Certains, comme la Trans Equality Society of Alberta, diffusent de l’information sur un vaste éventail d’enjeux relatifs aux droits des personnes trans, comme le droit de vote et l’éducation.

Des entreprises — dont Coca Cola et Apple — ont adopté des lignes directrices quant aux mesures à prendre pour soutenir les personnes trans, mais elles sont encore trop peu nombreuses.

L’organisme Egale donne aux employeurs de la formation sur la diversité et recommande aux entreprises d’adopter comme valeur centrale l’inclusion des différentes identités et expressions de genre.

Comme l’a dit Kael McKenzie, le juge nommé au Manitoba, « Je ne suis qu’un exemple parmi une foule de mes collègues qui obtiennent assez de notoriété pour montrer aux gens que nous sommes simplement des personnes… Nous pouvons réussir tout ce que nous voulons en travaillant fort et en nous dévouant à la tâche. »

La Commission canadienne des droits de la personne continuera de faire pression pour que les droits des personnes transgenres soient explicitement inscrits dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Recommandations aux entreprises pour l’adoption de l’inclusion comme valeur centrale selon Egale :

  • Se montrer ouvertes à connaître les antécédents de genre et l’identité de genre de la personne
  • Permettre à une personne trans d’utiliser la salle de toilettes correspondant à son identité de genre, et fournir des salles de bain neutres comme autre solution favorisant l’inclusion
  • Employer un langage neutre (ni masculin, ni féminin) comme « Bonjour, tout le monde » plutôt que « Bonjour, Mesdames et Messieurs »
  • Favoriser une culture d’inclusion de sorte que, peu importe l’identité sexuelle d’une personne, celle-ci puisse faire ce qu’elle a à faire dans son espace de travail
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